HISTOIRE LOCALE

 

SUJET 21 : Un émigrant au Chili - suite

 

Lors du précédent article nous avions vu comment Louis Giraudeau est parti de Loulay le 4 Mars 1891 pour le Chili. Après avoir suivi sa traversée en bateau nous allons maintenant le suivre sur la terre ferme.

 

Le 19 Avril 1891, notre Jarria débarque au port de Talcahuano. Par train, les émigrants se rendent à Santiago, la capitale du Chili. A Conception lors d'une halte Louis croise des soldats qui cherchent à l'enrôler pour la guerre (La guerre entre le Chili et la Bolivie). Mais '' on les a remerciés en leur disant que nous venions pas là pour nous faire tuer''. Lors du voyage, le train traverse les villes de : St Rosindo, Chillan, Linares, Villa Allegre, San Javier, Maule puis Calca. Lors d'un autre arrêt ''une bande de vilains masques viennent se présenter''. Le Bordelais qui ''baraguinait'' l'Espagnol explique qu'il s'agissait de brigands qui faisaient le complot de voler les voyageurs. Mais comprenant la misère de nos Français, ceux-ci se sauvèrent pour revenir avec un sac de coings qu'ils offrirent. Ils ne volaient que les riches !

Le 21 Avril le train arrive à la caserne d'émigration de Santiago. Le consulat Français y est un passage obligatoire pour obtenir sa carte d'émigrant.

Le 24 Avril Louis reprend le train pour se rendre dans la propriété de Pacifico Eucinas à Villa-Allègre. Il y retrouve son frère et son père qui y sont employés. Louis participe aux travaux. Il débroussaille avec la sadone (sorte de grosse bêche) puis participe aux vendanges.Il remarque que "les cuves à vendange sont réalisées en peaux de bœufs". Les repas sont composés de plat de pomme de terre, d'oignons et de viande bouillie ou bien de grands plats de haricots avec du maïs du blé et du port. L'habitation modeste, couverte de tuile et aux murs de terre blanchis accueille un mobilier improvisé. En guise de lit, des planches posées sur des billots soutiennent une paillasse gonflée aux feuilles de maïs.

Louis décide de changer de région pour aller dans l'Arancania. Embauché dans la colonie d'un Charentais nommé Jouannet, il travaille comme homme de confiance. Il y apprécie la chasse et quand viennent les moissons, ne se lasse pas d'observer la machine à battre ''système Américain'' capable de battre jusqu'à 300 sacs de 100 Kg de blé par jour. Un jour, un homme assez âgé qui rendait visite au patron l'aborde. Apprenant qu'il est originaire de Charente Inférieure et même du canton de Loulay Louis reconnaît en lui un nommé Richard parti de Saint Pierre de L'isle et dont personne n'avait plus de nouvelles.

En Mars c'est au magasin du Rochelais Paronneau à Traiguen que Louis travaille comme vendeur. Il a bien l'intention d'y perfectionner le ''Chilien''. Il projette de s'installer avec son père et son frère. Mais le bureau de colonisation refuse de lui concéder une colonie car ils ne sont pas mariés. Sur cette déception Louis Giraudeau décide de revenir en France.

Après un passage par Villa-allègre pour dire au revoir à son père et à son frère, Louis repart pour Valparaiso le 3 Mai 1892. Dans cette ville il se rend au consulat Français pour y obtenir le moyen de s'embarquer. Bien que faisant valoir son intention de revenir en France pour se soumettre au tirage au sort des conscrits, le consul lui signale que ce retour sera de sa poche. C'est à la Campagnie des Vapeurs Français qu'il s'adresse pour trouver un bateau. Le vapeur Le Chili ayant échoué et fait naufrage, c'est à bord du Ville de Belfort que Louis embarque le 27 mai. Après des escales sur les côtes chiliennes, le navire se dirige vers Montevideo en Uruguay avant de revenir par les îles du Cap Vert, les Canaries, Madères, le Cap Finistère puis le golf de Gascogne et enfin la Pointe de Bretagne. Le 13 Juillet le bateau accoste au Havre où Louis obtient un billet d'indigent pour se rendre à la Mothe Saint Héray. Cette dernière étape se fait en train par Paris puis Niort. Le 15 Juillet 1892 Louis Giraudeau arrive enfin chez sa mère.

 

Louis Giraudeau rédigeât le récit de son aventure ''un soir de rêverie la semaine avant son départ au service militaire'' le 10 Novembre 1893. Il avait sorti le numéro 7 au tirage au sort de la classe 1892 et organisa comme il était d'usage son bal des conscrits le 20 Octobre 1893 dans la salle de Mr Delaveaud cafetier au Petit Breuil.

P.Lacheteau